
Il y a peu de temps encore, on préparait en coulisse les défilés des prochaines fashion weeks. De nombreux acteurs de la mode parcouraient le monde, sautant d’un avion à l’autre à la recherche de nouvelles tendances, nouveaux fournisseurs ou lieux féeriques pour organiser les prochains shooting photo. C’était il y a quelques semaines à peine, c’était il y a une éternité. Aujourd’hui, malgré le déconfinement, plus rien n’est comme avant. La plupart des frontières aériennes demeures fermées, les soirées évènementielles sont toujours interdites, la promiscuité est clairement décriée car considérée comme suicidaire…Un état des lieux assez sombre que les professionnels tentent d’égayer par le biais de nouveaux formats de travail : la mode tient toute ses promesses et continue, fort heureusement, à être animée par une puissante dynamique créative.
L’état des lieux
Durant le confinement, les réseaux sociaux ont été les tristes témoins d’une débâcle vestimentaire. Tandis que certains s’essayaient au télétravail en chemise/caleçon, d’autres s’adonnaient à l’activité apéro-visio en grenouillère licorne pendant que certains people s’affublaient des tenues des plus ridicules…la catastrophe ne fût pas que sanitaire ! Drôle certes, mais pas très mode ! Fort heureusement, le vêtement a repris son rôle social, les professionnels leurs métiers respectifs, en tentant de s’adapter au mieux à la conjoncture.
Ils ont été nombreux durant la crise, à modifier leurs activités, à s’engager pleinement dans la lutte contre le virus : des grandes maisons de luxe aux PME familiales, de la mise à disposition de l’outil de production à la reconversion du personnel, ou encore de la fabrication de gels hydro à celle des masques ou des surblouses. Mais la pandémie a fait de nombreuses victimes, tant sur le plan humain qu’économique.
Déjà fragilisées avant la pandémie, le Covid a porté le coup de grâce à de nombreuses enseignes (André, la Halle, Célio, Camaïeu, naf naf ou encore Orchestra) et la liste ne cesse de s’allonger tous les jours. Même le mastodonte de la fast fashion, le groupe Inditex (Zara, Bershka, Stradivarius) vient d’ordonner la fermeture de 1 200 magasins à travers le monde. Effondrement des ventes, stocks cumulés, manque de trésorerie, tous les ingrédients d’une banqueroute généralisée semblent réunis. Alors, les entreprises toujours debout n’ont d’autre choix pour continuer à exister, que de repenser leurs stratégies car la voie de la guérison sera longue.
Prioriser la digitalisation
Historiquement, de toute crise nait un enrichissement. Et si finalement au lieu de projections angoissantes, cette mutation était un changement de cap salutaire ? Si le digital devenait LA solution pour répondre aux enjeux de demain ? Si capitaliser sur le succès de l’activité en ligne était le nouveau challenge des entreprises ? Le retail a connu une transformation toute aussi subite qu’inédite. Avec un fonctionnement 100% digitalisé durant plusieurs semaines, la tendance s’est inversée. Avant la pandémie, les points physiques étaient la béquille du web. Après la crise, le web sera probablement la colonne vertébrale de l’environnement physique.
Développement d’applications, paiement et livraison sans contact, télétravail, plateformes digitales, marketplaces, réseau sociaux ou déploiement de canaux spécifiques de vente en ligne, le Covid a contraint même les plus réfractaires à franchir le pas. Les marques qui s’y étaient déjà engouffrées sont celles qui s’en sortent le mieux ; elles continuent leur transformation. Les autres, tentent bon gré, mal gré, de rattraper leur retard. Le web a prouvé qu’il était à la fois un puissant média, un outil de distribution redoutable et un formidable levier de communication. Il a démontré que le système pouvait réagir aux situations les plus inattendues. Il a assuré la poursuite des ventes sans flux physique, permis aux marques de maintenir le contact et d’enrichir encore un peu plus l’expérience client.
Cette accélération technologique remet en question le modèle sociétal, économique et comportemental tel qu’on le connaissait. La crise oblige les entreprises à acquérir rapidement des compétences de pilotage d’activité à distance en se réinventant, en imaginant de nouveaux standards.
Collections croisières et Fashion Weeks digitales
A cet instant, nul n’est capable d’affirmer quel sera l’impact à long terme du Covid-19 sur la filière mode. A l’évidence, les distanciations physiques imposées ont déjà impactées le format des fashionweeks de cette fin de printemps. Pour combien de temps ? Nul ne le sait, mais une seule certitude, l’imprévu rend innovant!
Les grandes maisons ont bravé avec créativité et audace le malaise post covid offrant aux internautes des performances virtuelles aussi décalées qu’originales sur YouTube, Google, Instagram ou Facebook.
Hermès Homme a par exemple fait le choix du direct. Cyril Teste, metteur en scène de théâtre et réalisateur, a réalisé une prouesse artistique filmée en temps réel où décontraction et backstages étaient mis à l’honneur.
L’audacieux (et très geek) Olivier Rousteing a dévoilé la collection croisière Balmain au travers son avatar. Dans un show-room virtuel reconstitué pour l’occasion, il était le guide privilégié d’acheteurs professionnels rivés devant leur écran à l’autre bout du monde. L’enseigne de luxe a également ouvert la semaine de la mode par un défilé anniversaire exceptionnel. Les 75 ans de la marque ont été célébrés en grande pompe sur une péniche, où les pièces emblématiques de la griffe avaient été revisitées pour l’occasion. Danses et concert ont ponctué la croisière fluviale pour le plus grand bonheur des spectateurs assis sur les rives de Seine. Un évènement retransmis en exclusivité sur TikTok.
Dior a choisi le court métrage pour s’exprimer. Le spectateur était immergé dans un monde féérique, vite ensorcelé par des créatures mythologique vagabondant dans un jardin d’Eden. Un format court d’une beauté époustouflante, ode au Théâtre de la Mode.
Chanel a préféré miser sur la simplicité. Le défilé croisière initialement prévu à Capri s’est finalement transformé en shooting photo en région parisienne, où des paysages méditerranéens ont été intégrés post production. La maison de la rue Cambon a livré une collection resserrée avec seulement 4 mannequins, 51 silhouettes mises en scène dans un look book animé.
Quelques maisons ont fait le choix du minimalisme en ne présentant qu’une pièce (Iris Van Herpen) ou en exhibant seulement quelques croquis exclusifs de la prochaine collection (Schiaparelli ou Elie Saab).
Loin de l’effervescence d’une traditionnelle Fashion Week, les présentations des collections étaient cependant très attendues et largement saluées par la critique. Même si chacun s’interroge déjà sur le prochain format des défilés parisiens de la rentrée, la transition phygitale semble bel et bien amorcée dans de nombreux pays.
Londres a déjà tranché avec l’annonce de l’annulation des défilés pour les douze mois à venir. En lieu et place, fusionneront sur une plateforme digitale, la mode masculine et féminine, sorte de fluidité des genres virtuelle. Des centaines de designers y seront mis à l’honneur avec des contenus numériques très variés (portraits, interviews, podcasts, carnets de designers, webinars ou showrooms digitaux). Quid de la prochaine Fashion week de Paris ? On sait seulement qu’elle sera créative. Nos écrans se chargeront certainement de nous dévoiler le reste…
IFA Paris au cœur des mutations
L’école n’a pas tardé à réagir en proposant dès le mois de Mars une plateforme e-learning permettant durant le confinement le maintien des cours, tels qu’initialement prévus. Tutos vidéo, création de supports interactifs, cours théoriques enregistrés, tout a été mis en œuvre pour continuer à fournir aux étudiants confinés chez eux (et disséminés dans de nombreux pays) des contenus qualitatifs.
Toujours très réactive et visionnaire, au plus près des tendances de l’industrie de la mode, IFA Paris reprendra normalement les formations en présentiel dès la rentrée, mais complète d’ores et déjà son offre d’un parcours 100% en ligne. Ouvert à tous ceux qui souhaitent découvrir ou parfaire leurs connaissances de la mode, l’apprentissage à distance est maintenant à portée de clic. Débutants ou futurs experts, modules courts ou formation diplômante de 3ème cycle, chacun trouvera depuis son chez soi, la réponse la plus adaptée à ses besoins. Découvrez tous les programmes ici: https://www.ifaparis-online.com
Chaque partie doit faire face à des problématiques inédites. Déjà en phase de déclin, la fast fashion est confrontée aux inconvénients de l’approvisionnement en circuit long, les enseignes de luxe souffrent de la désertion de la clientèle internationale, le commerce indépendant pâtit directement de la baisse du pouvoir d’achat des consommateurs. Qui peut prédire l’avenir quand toutes les données du passées sont biaisées, quand personne n’a de recul face à pareille situation ? Personne. Mais il semblerait que tout le monde s’accorde à vouloir utiliser cette période transitoire comme une phase de réflexion et d’actions salvatrices.